Réforme des retraites : Zoom sur les principales dispositions du projet de Loi

Après une première présentation le 10 janvier 2023, le PLFRSS portant la réforme des retraites a été présenté en Conseil des ministres le 23 janvier dernier, avant examen par l’Assemblée nationale et le Sénat qui devrait s’achever le 26 mars selon la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet. 

Le texte devrait ensuite être adopté rapidement car le Parlement disposera uniquement de 50 jours à compter de son dépôt pour le voter. Nous rappelons que cette Loi est censée s’appliquer dès le 1er septembre prochain.
Relèvement de l’âge légal de départ à 64 ans, accélération du calendrier Touraine, création d’un Index seniors et d’un fonds visant à prévenir la pénibilité…

Nous vous présentons les principales dispositions à retenir de ce projet de Loi.

Vers un âge de départ à 64 ans en 2030 et une durée de cotisation de 43 ans dès 2027

Actuellement un salarié du privé qui souhaite partir à la retraite avec une pension complète doit avoir atteint 62 ans et bénéficier d’une durée de cotisation suffisante, durée qui augmente régulièrement depuis la réforme Touraine de 2014 et devait atteindre 43 ans d’ici 2035. L’âge d’annulation de la décote, c’est-à-dire permettant de bénéficier automatiquement d’une retraite à taux plein, même sans avoir travaillé 43 ans, est fixé à 67 ans.

Si ce dernier point demeure inchangé, l’âge légal de départ est quant à lui relevé de 62 à 64 ans, à raison de trois mois de plus par année de naissance à compter du 1er septembre 2023. Il sera donc réellement de 64 ans en 2030.

Quant à la durée de cotisation, elle reste fixée pour un taux plein à 43 annuités. Mais le calendrier Touraine est accéléré : ces 43 annuités seront nécessaires dès 2027, soit huit ans avant la date prévue (ajout d’un trimestre par année et non plus d’un tous les trois ans). Cela provoque une augmentation de la durée d’assurance dès les générations nées en septembre 1961.

Reforme des retraites

Quid des possibilités de départ anticipé ?

Le projet regroupe dans une disposition générique les dispositifs de départs anticipés, à la fois pour carrière longue, pour retraite progressive et pour des raisons liées à l’état de santé, au handicap ou à l’incapacité permanente des assurés, ainsi qu’au titre du compte professionnel de prévention (C2P). Les personnes concernées seront ainsi bien exclues du relèvement de l’âge légal de départ à 64 ans. Cependant, le projet de Loi nous plonge dans l’incertitude concernant les conditions de départ anticipé, lesquelles seront définies par décret…

De même, le gouvernement avait présenté dans le détail les changements opérés dans les dispositifs « carrières longues » :

  • Les personnes qui remplissent les conditions actuelles pourront toujours partir deux ans avant l’âge légal, donc à 62 ans lorsqu’il sera à 64 ans
  • Un nouveau dispositif « carrières très longues » permettra de partir quatre ans avant l’âge légal, c’est-à-dire à partir de 60 ans, à la condition d’avoir validé quatre ou cinq trimestres avant 18 ans et d’avoir cotisé 44 ans
  • Les personnes ayant commencé à travailler avant 16 ans, le départ continuera d’être possible à compter de 58 ans, sous réserve d’avoir cotisé la durée d’assurance requise majorée d’une année, et non plus de deux années, ces déclarations devront être confirmées par décret.

Autre nouveauté, notamment à la faveur des femmes : les périodes validées au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) seront désormais prises en compte dans la durée travaillée pour partir au titre des carrières longues, dans la limite de quatre trimestres.

Une revalorisation des petites pensions « pour garantir une retraite décente »

Le minimum de pension sera porté à 85 % du Smic net, soit 1 200 euros bruts, et augmentera ainsi de 100 euros par mois pour les retraites liquidées à compter du 1er septembre 2023. Cette mesure s’appliquera aux salariés, aux artisans-commerçants ainsi qu’aux agriculteurs, et concernera aussi les pensions minimales des personnes déjà à la retraite.

L’indexation sur le Smic sera inscrite dans la loi afin que le dispositif soit pérenne et, une fois liquidées, les pensions concernées resteront indexées sur l’inflation. Attention : il faudra avoir fait toute sa carrière au Smic pour bénéficier de cette pension de près de 1 200 euros par mois et si pour certains bénéficiaires, le montant brut équivaudra au net du fait d’une exonération de CSG, la plupart des personnes seules dans cette situation sont assujetties au taux réduit de 3,8 %, ce qui affectera tout de même à la baisse le montant réel de la pension.

Dans ce même objectif d’augmenter les petites pensions, notamment des femmes ayant eu des carrières hachées, les périodes validées au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer (congé parental, congé paternité) seront comptabilisées dans le calcul du minimum de pension majoré. Une validation de trimestres sera rendue possible pour tous les aidants familiaux contraints de réduire ou d’interrompre leur activité pour s’occuper d’un proche et pour les personnes ayant effectué des stages dits de « travaux d’utilité collective » (TUC).

reforme des retraites

Accent mis sur une meilleure prise en compte de la pénibilité et de l’usure professionnelle

Dans le volet « prévenir l’usure professionnelle », de nombreuses mesures sont mobilisées :

  • Un accès élargi au compte professionnel de prévention (C2P) : les seuils des principaux facteurs d’exposition aux risques professionnels seront abaissés, comme celui sur le travail de nuit (100 nuits par an au lieu de 120) et celui du travail de nuit en équipes successives alternantes (30 nuits par an au lieu de 50), ce qui fera entrer davantage de salariés dans le dispositif.
    Les points seront acquis plus rapidement pour les salariés exposés à plusieurs risques et sans limite de nombre (plafond de 100 points actuellement) ; un point au C2P ouvrira un droit de 500 euros de financement de formation, contre 375 euros aujourd’hui.
  • La création d’un droit à la reconversion : pour faciliter les changements de carrière des bénéficiaires du C2P. 60 points acquis sur le compte permettront ainsi de financer une formation longue et qualifiante de 30 000 euros.
  • Un nouveau fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle : doté d‘un montant fixé chaque année par arrêté (un milliard d’euros sur la durée du quinquennat selon les annonces du gouvernement), son mode de fonctionnement, ou encore les modalités de gestion et d’affectation de ses ressources seront précisés par décret en Conseil d’Etat. Créé à destination de salariés exerçant les métiers les plus exposés aux facteurs de risques ergonomiques, il financera des actions de sensibilisation, de prévention, de reconversion et de prévention de la désinsertion professionnelle. Ces salariés bénéficieront d’un suivi renforcé de la médecine du travail à compter de la visite médicale de mi-carrière qui intervient aux 45 ans, mais aussi de dispositifs d’adaptation du poste de travail et d’un accès renforcé à la reconversion professionnelle.
  • Une visite médicale de fin de carrière : pour les salariés les plus exposés aux risques d’usure professionnelle. Elle sera rendue obligatoire à 61 ans pour permettre un départ anticipé à tous ceux qui ne sont pas en mesure de continuer à travailler et sont ainsi reconnus inaptes au travail.

Des mesures pour favoriser l’emploi des séniors

Le cumul emploi-retraites deviendra créateur de droits et ses conditions d’exercice seront déplafonnées, l’accès à la retraite progressive sera facilité et ouvert à la fonction publique ainsi qu’à l’ensemble des travailleurs indépendants.

Un Index senior sera créé, avec une obligation de publication annuelle pour les entreprises de plus de 1 000 salariés dès le 1er novembre 2023, et celles de plus de 300 salariés dès le 1er juillet 2024. A défaut, elles se verront infliger des sanctions financières d’un montant fixé par l’autorité administrative dans la limite de 1 % de la masse salariale. L’emploi des seniors deviendra aussi un objet obligatoire de la négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP) en s’appuyant sur les indicateurs de l’Index. Cette obligation de négociation suivra le même calendrier que celui de la publication de l’Index indique l’exposé des motifs.

Fermeture des régimes spéciaux

La réforme acte la fermeture des régimes spéciaux de retraite de la RATP, de la branche des industries électriques et gazières (IEG), des clercs et employés de notaires, des personnels de la banque de France ainsi que des membres du Conseil économique social et environnemental (CESE). Néanmoins, seuls les nouveaux embauchés recrutés à compter du 1er septembre 2023 dans ces régimes seront affiliés au régime général.
Les régimes autonomes (professions libérales et avocats, marins, Opéra de Paris, Comédie Française) ne seront pas concernés par cette fermeture.
Le décalage progressif de deux ans de l’âge légal et l’accélération du passage à 43 annuités pour un départ à taux plein s’appliqueront aux salariés actuels en tenant compte de leurs spécificités. En conséquence, les dispositions à cette fin seront prises par décret au premier semestre 2023 après consultation des régimes concernés, pour une entrée en vigueur des nouvelles règles relatives à l’âge de départ en 2025.

Enfin, le projet de transfert du recouvrement des cotisations de retraite complémentaire Agirc-Arrco à l’URSSAF est définitivement abandonné.

Article rédigé en février 2023 par Laurent Guyon, Directeur de Mission Social Endrix.

Partager cet article

Besoin d’un accompagnement ?
N’hésitez pas à nous contacter

Continuer sur la même thématique

Les actus Endrix
20 mars 2024
Echangez avec nos équipes dédiées à l’ESS et (re)découvrez nos offres d’accompagnement dédiées aux acteurs de l’ESS lors du 35ème Congrès de l’Uniopss, LE rendez-vous incontournable de 2024 pour tous les acteurs associatifs des solidarités et de la santé, qui se déroulera les mercredi 3 et jeudi 4 avril 2024 au Centre de Congrès de Lyon.
Expertise Comptable
18 mars 2024
Contrairement aux salariés, les travailleurs indépendants ne sont pas couverts à titre obligatoire contre les risques accidents du travail et maladies professionnelles. Ils sont toutefois pris en charge par la sécurité sociale au titre de la maladie, et peuvent souscrire une assurance volontaire pour améliorer leur protection.